Un lidar, c'est quoi?

Généralités 


La télédétection par laser ou LIDAR, acronyme de l'expression anglo-saxonne « LIght Detection And Ranging », désigne une technologie de télédétection ou de mesure optique basée sur l'analyse des propriétés d'une lumière laser renvoyée vers son émetteur. Le lidar permet, entre autres, de mesurer des propriétés de l'atmosphère, tels que la concentration d'aérosols, la concentration de certains polluants ou gaz (tels que l'ozone ou le NO2), mais aussi d'autres caractéristiques (telles que la température ou la vitesse du vent), sur un domaine d'altitude très important : entre quelques mètres et plus de 100km pour les lidars les plus puissants. 

Le lidar de DDU permet de mesurer l'ozone, ainsi que la concentration d'aérosols dans l'atmosphère, entre 10 et 50 km d'altitude, avec une résolution de 60 mètres. Il fait parti d'un réseau international, le NDACC, qui regroupe une centaine de stations lidars, donc 3 en France (à l'Observatoire de Haute Provence, à La Réunion et à Dumont D'Urville).

Ce lidar a été installé en 1989. Il ne pouvait alors mesurer que la concentration d'aérosol. Deux ans plus tard, une amélioration lui a permit de pouvoir mesurer également la concentration d'ozone dans l'atmosphère.

Fonctionnement d'un lidar


Le fonctionnement d'un lidar est identique au fonctionnement d'un radar (RAdio Detection And Ranging), à la différence que l'on utilise de la lumière issue d'un laser au lieu des ondes radio. L'avantage du faisceau laser, c'est qu'il est très directif, polarisé, et très puissant. 

Le lidar utilise le fait que chaque molécule ou particule de l'atmosphère renvoie une petite partie du signal laser (par diffusion Rayleigh Mie). On va donc envoyer des impulsions laser très puissantes, collecter la lumière rétrodiffusée à l'aide d'un télescope , et obtenir un signal en fonction de l'altitude. La figure précédente résume parfaitement le fonctionnement d'un lidar. 

On peut voir que, dans les basses altitudes, le laser ne rentre pas dans le champ de vu du télescope : on ne voit rien. Lorsque le faisceau est entièrement dans le champ de vue du télescope, le signal reçu sur le détecteur va diminuer de façon exponentielle avec l'altitude. Enfin, lorsque le faisceau traverse une couche d'aérosol, le signal reçu sur le détecteur augmente. 

Pourquoi le signal diminue-t-il de façon exponentielle? Ceci est du à deux choses : tout d'abord, comme une partie du signal est absorbée et diffusée par les molécules de l'atmosphère, celui-ci diminue au fur et à mesure. Deuxièmement, plus on est haut en altitude, plus la pression est faible. Qui dit pression faible dit moins de molécules et donc moins de lumière renvoyée vers le détecteur. 

Pourquoi les aérosols diffusent-t-ils plus que les molécules? Quand on parle d'aérosol, ou de particules, on parle de poussière ou de pollution, c'est-à-dire à des objets de l'ordre du dixième de millimètre. Une molécule est 1000 fois plus petite, et va donc diffuser beaucoup moins que les particules. 

Différents types de lidar

Le fonctionnement que l'on vient de voir correspond au fonctionnement d'un lidar Raileigh-Mie, car il est basé sur les diffusions de Rayleigh et de Mie. C'est le lidar le plus courant et le plus simple à réaliser. Il sert principalement à mesurer la concentration d'aérosol dans l'atmosphère. Mais il existe d'autres types de lidar, qui permettent de mesurer d'autres caractéristiques de l'atmosphère. 

– lidar DIAL : ce type de lidar permet de mesurer la concentration d'une molécule en particulier dans l'atmosphère. Il s'agit en fait d'utiliser 2 lidars Rayleigh à deux longueurs d'onde différentes, une première étant absorbée par la molécule et la deuxième non, et de prendre le rapport des deux signaux lidar. Cette technique est utilisée ici, à Dumont D'Urville pour mesurer l'ozone. 

– lidar RAMAN : on utilise l'effet raman (à la différence de l'effet Rayleigh Mie), qui dit qu'une molécule va renvoyer une petite partie du signal reçu, mais à une longueur d'onde différente de celle incidente. Cette technique permet de mesurer une molécule en particulier (comme pour la technique DIAL) mais demande des lasers plus puissants (l'effet raman est 1000 fois moins important que l'effet Rayleigh Mie). 

– Lidar DOPPLER (ou lidar vent) : utilise l'effet DOPPLER, qui dit que l'onde incidente est décalée en fréquence selon la vitesse de la particule rencontrée, pour mesurer la vitesse du vent. 

Détermination de la concentration d'aérosol
Le calcul précis de la concentration d'aérosol est quelque chose d'assez difficile, car un aérosol va diffusé la lumière d'une façon différente selon sa taille, sa forme et de la longueur d'onde reçue. Pour caractériser au mieux les aérosol, on utilise plusieurs longueurs d'onde, et on étudie également le rapport de dépolarisation. Ce dernier permet de donner une information sur le type d'aérosol. Par exemple, une gouttelette d'eau va moins dépolariser la lumière qu'un cristaux de glace. Je ne rentrerais pas dans les détails, mais si vous êtes intéressés, il y a pleins de site sur internet qui traitent du sujet. 

Le lidar de Dumont D'Urville 

Le lidar de DDU est composé de deux lasers et de 11 détecteurs. Un premier laser solide Nd-Yag, émettant à 1064nm (infrarouge) avec une puissance de 300mJ à une fréquence de 10 Hz. A l'aide d'un cristal doubleur et d'un cristal tripleur de fréquence, on transforme une partie de cette longueur d'onde dans le visible (532nm, du vert) avec une puissance de 250 mJ et dans l'ultraviolet (355nm) avec une puissance de 150mJ. Le deuxième laser, à gaz cette fois-ci, émet dans l'ultraviolet à 308nm avec une puissance de 200mJ à une fréquence de 80 Hz.. 

Pour la mesure d'aérosol, on utilise 5 détecteurs : 1064nm, 532nm parallèle voie haute, 532nm parallèle voie basse, 532nm perpendiculaire et voie raman 607nm. Ce que l'on appelle parallèle et perpendiculaire, c'est la polarité de la lumière. En étudiant le rapport entre ces voies, on obtient un profil de dépolarisation. On distingue également une voie haute et une voie basse. Dans la première, on va injecter 92% du signal alors que dans la deuxième, on envoie seulement 8%. La puissance lumineuse reçut diminuant de façon exponentielle, les détecteurs doivent donc pouvoir mesurer de très faibles puissance lumineuses pour les hautes altitudes mais également de très fortes puissances lumineuses pour les basses altitudes. Mais si on leur envoie trop de lumière, ils saturent. Pour éviter ces problèmes, on divise le faisceau et on étudie les basses couches de l'atmosphère sur les 8% du signal et les hautes couches de l'atmosphère sur les 92% du signal restant. A noter que la mesure aérosol ne requiert qu'un seul laser : le Nd-Yag. 

Pour la voie ozone, on utilise 6 détecteurs : 355nm haut, 355 nm bas, 387 (voie raman), 308nm haut, 308nm bas et 332 (voie raman). Pour la mesure ozone, il faut les deux lasers. 

Le lidar de DDU en image 

Shelter où se trouve le lidar 

Intérieur du shelter lidar, pendant une mesure 

Mesure du lidar de DDU
Fig 2 
Figure 2 : Backscatter ratio de la journée du 30 juillet 2012. Le Backscatter ratio correspond à la proportion d'aérosol dans l'atmosphère. Quand il est égale à 1, il n'y a pas d'aérosol. On peut voir ici une perturbation nuageuse arrivant vers 18h (cirrus vers 8-10km) mais une couche d'aérosol vers 20 km. Cette couche est appelé PSC pour Polar Strotospheric Cloud (Nuage Stratosphérique Polaire) : ce sont ces nuages qui sont responsables de la destruction de l'ozone aux pôles.
Fig 3 
Figure 3 : Concentration d'ozone au dessus de DDU le 12 avril 2012. On observe très bien la couche d'ozone entre 10 et 30 km 
Fig 4 
Figure 4 : Concentration d'ozone au dessus de DDU le 26 septembre 2012. On observe un manque d'ozone vers 18 km : c'est ce que l'on appelle le trou de la couche d'ozone